ISUOG 2025: Standardisation de l’évaluation de la croissance fœtale : défis, biais et perspectives

Au cœur de l’actualité échographique, la croissance fœtale et les courbes de croissance ont récemment été mises à l’honneur lors d’une conférence de l’ISUOG 2025, présentée par le Pr Laurent Salomon de l’hôpital Necker.
Retour sur les points essentiels à retenir, et en particulier sur les enjeux liés au choix des référentiels pour les courbes prescriptives.

ISUOG 2025: Standardisation de l’évaluation de la croissance fœtale : défis, biais et perspectives

La croissance fœtale constitue un déterminant majeur de la morbidité et de la mortalité périnatales. Les anomalies de croissance, qu’il s’agisse d’un retard de croissance intra-utérin (RCIU) ou d’un excès pondéral fœtal, sont associées à des complications obstétricales et néonatales. Toutefois, contrairement au dépistage d’anomalies chromosomiques ou cardiaques, il n’existe pas de « gold standard » unique permettant de définir de manière universelle une croissance fœtale pathologique.

 

Défis actuels

L’absence de définition consensuelle

Malgré la publication du consensus de Delphi il y a près de 10 ans, une grande hétérogénéité persiste dans les définitions utilisées pour caractériser le RCIU, qu’il soit précoce ou tardif. Cette variabilité engendre des performances très inégales des outils de dépistage.

 

La qualité des mesures biométriques

Les erreurs précoces ont un impact majeur sur les évaluations ultérieures. Par exemple, une erreur de 3 mm sur la mesure de la longueur cranio-caudale (CRL) au premier trimestre peut déplacer un fœtus du 10 au 3 ou au 22 percentile au deuxième trimestre. De même, une erreur de 10 mm sur le périmètre abdominal au troisième trimestre équivaut à 100 g de variation sur le poids fœtal estimé (PFE).

 

Le biais d’attente

Les échographistes sont influencés par les valeurs attendues affichées à l’écran, phénomène objectivé par des études utilisant le suivi oculaire. Ce biais affecterait jusqu’à 90 % des examens.

 

La multiplicité des courbes

Le choix du référentiel a un impact direct sur la pratique clinique :

  • Les courbes descriptives reflètent la croissance observée dans une population donnée (avec biais environnementaux et nutritionnels).
  • Les courbes prescriptives définissent comment le fœtus devrait croître dans des conditions optimales.

L’OMS et plusieurs sociétés savantes plaident pour l’adoption de courbes prescriptives internationales.

ISUOG 2025: Standardisation de l’évaluation de la croissance fœtale : défis, biais et perspectives

Recommandations pratiques

Premier trimestre :

Mesurer la CRL avec des critères de qualité stricts.

Utiliser des standards modernes et prescriptifs pour la datation.

 

Deuxième et troisième trimestres :

Employer des référentiels récents et prescriptifs pour HC, AC et FL.

Éviter le biais de confirmation en réalisant des mesures objectives et reproductibles.

 

Poids fœtal estimé (PFE) :

Utiliser l’équation de Hadlock à trois paramètres (HC, AC, FL).

Reporter les résultats sur des courbes de PFE, et non de poids de naissance.

 

Moment des examens :

Troisième trimestre : un examen recommandé à 35–36 SA pour optimiser la détection des anomalies de croissance.

Intervalle minimal de 3 semaines entre deux PFE pour évaluer un gain pondéral significatif.

 

Dopplers :

Intégrer systématiquement les Dopplers (artère utérine, ombilicale, cérébrale moyenne) dans l’évaluation du RCIU, en particulier au troisième trimestre.

 

Définition et prise en charge :

Adopter le consensus Delphi pour distinguer RCIU précoce et tardif, en combinant biométrie et Doppler.

Suivre les recommandations internationales (ISUOG, EAPM) pour la surveillance et le déclenchement en cas de RCIU confirmé.

ISUOG 2025: Standardisation de l’évaluation de la croissance fœtale : défis, biais et perspectives

Discussion

L’amélioration de la détection des anomalies de croissance fœtale repose moins sur le développement de nouvelles formules que sur la rigueur méthodologique et la standardisation des pratiques. Les futures perspectives incluent l’intégration d’outils d’Intelligence Artificielle pour limiter le biais de mesure et affiner la stratification des risques.

Conclusion

La croissance fœtale doit être évaluée dès le premier trimestre par des mesures rigoureuses et standardisées, en utilisant des courbes prescriptives internationales et le calcul du PFE par la formule de Hadlock (3 paramètres). L’intégration des Dopplers et du consensus Delphi constitue aujourd’hui la meilleure stratégie pour homogénéiser le dépistage et la prise en charge du RCIU.

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